mercredi 3 février 2021

Pesticides naturels ? Cuivre, les dérives cachées de l'Agriculture Biologique...


Le cuivre représente à l'heure actuelle 5 % du tonnage total des produits phytosanitaires. Son usage est indispensable en agriculture biologique. Alors comment expliquer qu'il figure sur la liste des produits que le Parlement européen veut interdire depuis 2019...






Le cuivre dans le collimateur du parlement européen.
Les partisans du label AB doivent une fière chandelle à l’industrie chimique. Sans la persévérance de onze entreprises spécialisées dans les pesticides, le cuivre aurait probablement subi le même sort que la roténone: utilisation interdite dans l'UE car polluant ! 

Or, comme l’indique Éric Maille, technicien viticole en agriculture biologique « les alternatives ne permettent pas actuellement un abandon de ce produit (notamment en vignes et en arboriculture) »

Du coup pour sauver l'Agriculture Biologique on fait une exception pour le cuivre : ce métal lourd non dégradé dans les sols et utilisé comme produit phytosanitaire naturel. Comme quoi naturel et polluant ne sont pas antinomique, mais chuuuuuut, il ne faut pas le dire.


Déjà interdit aux Pays-Bas et au Danemark.
Aujourd’hui, le cuivre est interdit dans plusieurs pays de l’Union européenne. Les Pays-Bas ont retiré son usage dès 1999, invoquant en premier lieu les risques pour la santé de l’utilisateur. « Même en utilisant des mesures de protection adéquates, l’usage de l’oxychlorure de cuivre présente un risque pour l’utilisateur s’il subit une exposition cutanée ou par inhalation », indiquait alors le ministère de l’Environnement hollandais. « cette interdiction n’est valable que pour les agriculteurs conventionnels, le cuivre étant toujours accepté en agriculture biologique », précise Jeroen Meeussen, de l’Autorité de régulation néerlandaise (CTGB). 

D’autres pays ont supprimé tous les usages du cuivre. C’est le cas du Danemark, dont le plan de réduction des produits phytos est présenté comme un modèle.

Une pollution pérenne des sols par le cuivre.
Certes, les doses de 20 kg/ha, couramment utilisées jusque dans les années quatre-vingts, ont été abandonnées. Depuis 2002, les doses maximales recommandées oscillent en effet entre 3 et 5 kg/ha et par an. Cependant, « 5 kg correspondent à déverser sur les sols une demi-tonne de cuivre au bout d’un siècle », remarque Denis Dubourdieu, professeur d’oenologie à l’université de Bordeaux. « Imaginez l’état des sols si l’on avait utilisé le cuivre depuis le début de la culture de la vigne, c’est-à-dire au moins 2000 ans ! », poursuit-il. 

Thierry Coulon, directeur technique de l’Institut français de la vigne, confirme qu’« il existe de nombreux exemples où, dans des sols acides, les quantités de cuivre fongicide accumulées depuis un siècle d’usage empêchent aujourd’hui l’herbe, le blé ou même des arbres fruitiers, de pousser ». Il estime que « dans le meilleur des cas, on peut descendre jusqu’à 400 gr/ha et par application ». Il encourage donc une utilisation très raisonnée du cuivre. 

Entre 2001 et 2004, Dominique Forget, directeur de Château Couhins – un domaine expérimental viticole de l’Inra –, a réalisé une évaluation agri-environnementale de la conduite de la vigne en agriculture biologique et en production intégrée. Bien que « par la diversité de ses pratiques et l’imagination de ses praticiens, l’agriculture biologique offre des pistes intéressantes à exploiter », explique-t-il, « l’impact environnemental de la production intégrée est plus favorable que celui de l’agriculture biologique, notamment au niveau des indicateurs phytosanitaires »

Principale raison : le « nombre de passages pour les applications de cuivre, qui a un impact important sur le sol mais aussi sur les eaux de profondeur et l’air ».

Les impacts à long terme
Mais le cuivre ne pose pas seulement des problèmes de saturation des sols. Selon le document de l’Efsa, son impact à long terme sur les oiseaux, les vers de terre et les organismes aquatiques, n’a pas été suffisamment étudié. « Sur la base des informations reçues, un risque élevé à long terme pour les vers de terre a été identifié », indiquent les experts, qui ajoutent que « le risque de bioaccumulation dans les organismes aquatiques n’a pu être correctement établi en raison de données manquantes ».
Cheers,
F.








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